Par MARIE-CLAUDE PARADIS-VIGNEAULT
(C) ULTRA NAN
On a vu apparaitre au cours des derniers jours des pages Facebook d’entraide et de solidarité envers les gens qui subissent de plein fouet les effets collatéraux de la crise de santé publique Covid-19.
Il y a du monde bien fins, et sûrement bien intentionnés là-dedans, qui offrent toutes sortes d’aide et de services, mais des fois, les bonnes intentions se traduisent mal dans les gestes.
J’ai été particulièrement dérangé par celles et ceux qui veulent aider des gens dans le besoin, par exemple, en leur offrant d’aller leur porter une épicerie à leur frais. Dans certains cas, ça devient quasiment un concours où l’on invite les gens à décrire leur situation, puis tant qu’à faire, à accompagner leur description d’une photo. J’ai vu une samaritaine bien contente d’avoir finalement choisi une famille avec quatre enfants parce qu’elle avait été très touchée par la photo familiale qui venait avec leur histoire.
Attends un peu: Demandez à du monde de te vendre leur misère en échange de peut-être leur offrir une épicerie? C’est tellement wrong.
Tout le monde mérite de manger à sa faim. Sans exception. Et tout le monde mérite un minimum de dignité humaine. Sans exception. Nous sommes tous humains.
Je n’ose imaginer la honte et la tristesse pour une personne qui prend le temps d’aller expliquer sa situation à une inconnue, de se faire dire que finalement, elle n’a pas été choisie. Les enfants de l’autre sont plus cutes, leur histoire plus touchante, bref, les autres le méritent plus que toi ce panier-cadeau. C’est clair qu’un gars de 27 ans qui vit tout seul ne gagnera pas à ce concours-là, mais il a faim lui aussi, et il serait peut-être le premier à venir t’aider la journée où toi tu te retrouveras dans ses chaussures, parce que tout le monde est précaire. C’est juste qu’on ne s’en rend pas compte dans le confort de nos illusions capitalistes, jusqu’à temps qu’une crise vienne ébranler notre mode de vie.
Moi aussi je suis grandement préoccupée par les impacts du Covid-19 sur les gens en situation de précarité financière. Il y a des milliers de Québécois.e.s qui en arrachaient avant le 14 mars 2020, et qui sont les premier.e.s à subir les contre-coups des mesures d’urgence émises par le gouvernement. Il n’y a pas une journée où je ne me demande pas comment aider les plus fragilisés, comment mieux soutenir les organismes qui leur viennent en aide. Et même sur la première ligne, je n’ai pas les réponses.
Aujourd’hui, j’ai choisi de faire un don à Moisson Estrie. J’habite Sherbrooke, et j’ai confiance en cet organisme qui utilisera cet argent à bon escient. C’est eux les experts de l’aide alimentaire, pas moi. Je fais ce don sans condition de sélection et anonymement. Je n’ai pas besoin d’avoir un lien direct avec les gens que j’aide ni d’exercer un contrôle sur l’utilisation qu’ils en feront. Je ne le fais pas pour recevoir une quelconque forme de reconnaissance. Je n’attends pas de merci. J’ai juste besoin d’agir en conformité avec mes valeurs et d’être solidaire.
Je vous invite à faire de même. À donner sans condition si vous en avez les moyens. Anonymement. Ne lancez pas de concours de charité sur Facebook. Écrivez aux organismes communautaires de votre région, à la popote roulante de votre quartier, à votre Centre d’action bénévole pour donner du temps ou des ressources, enfin, donnez à la cause qui vous tient le plus à coeur. Surtout, faites confiance à celles et ceux qui tiennent à bout de bras les ficelles de notre tissu social. ❤️
Une réflexion sur “Covid 19: La solidarité n’est pas un concours de charité”